Car ils sont évidemment inséparables
Comme toujours, la connaissance du passé éclaire le présent et donne des pistes pour l’avenir. Il ne le trace pas évidemment, cela nous incombe.

Dans sa configuration actuelle, l’hôtel du Palais, on a failli écrire « notre » hôtel du Palais, date de 1905. On relèvera juste, plaisamment, que l’architecte du premier bâtiment, la Villa Eugénie, fut Edouard Couvrechef, architecte de la Couronne !
L’après-guerre sonne le glas de l’hôtellerie de luxe biarrote. Qu’ils aient été réquisitionnés et volontairement maltraités par l’occupant ou, involontairement, par l’armée de Libération comme hôpitaux arrière, les grands hôtels ont été très abîmés. Dans l’ambiance morose de la fin des années 40 leurs propriétaires ne les rénovent pas mais les vendent à la découpe. On imagine difficilement ce que serait aujourd’hui le carrefour du Palais avec Majestic, Carlton, Continental, Victoria, Lefèvre en hôtels quatre et cinq étoiles !

Au début des années 60, Biarritz se trouve dans la situation préoccupante d’une cité balnéaire dotée de l’un des plus beaux palaces d’Europe mais privée des hôtels de luxe qui doivent l’accompagner car, seul, il ne peut durer. Il est à son tour menacé.
C’est par une décision visionnaire qu’en 1956, le maire Guy Petit le fait acheter par la Ville et en confie la gestion en 1962 à une société de droit privé, apte à œuvrer dans le secteur commercial et concurrentiel, dont des Biarrots seraient actionnaires minoritaires, la Ville y étant majoritaire : la SOCOMIX était née. Une première conséquence d’importance sera l’appropriation par les Biarrots de cette institution emblématique.
Ainsi est évitée la menace imminente de la vente à la découpe et engagée la survie de l’hôtel ce qui aura, au-delà de ce seul fait, un impact définitif sur la politique touristique de Biarritz.
Intéressons-nous d’abord à celle-là, à ce qu’elle est devenue et pourquoi.
Car si le Palais induisit cette politique dans les années 60, c’est aujourd’hui l’inverse : ce que notre ville est devenue va guider l’avenir du palace.
Puisque la comparaison est souvent faite, évacuons-la tout de suite : Cannes a un climat méditerranéen où il ne pleut quasiment pas l’été, un festival de cinéma qui dès 1948 hisse la ville à une reconnaissance mondiale et une myriade de grands hôtels. Aujourd’hui, elle compte pas moins de dix hôtels cinq étoiles en front de mer, dotés de leur plage privée et un grand nombre de quatre étoiles. Ce sont eux qui font de Cannes une cité repaire qui attire une riche clientèle qui va, à son tour, façonner les cités voisines de la Côte d’Azur, car l’argent appelle l’argent et une certaine société réclame l’entre soi.
Biarritz, et nous n’en sommes pas malheureux, ce n’est pas ça. Ce qui fait le charme de notre station, c’est le mélange des séjours de luxe et des vacances de classe moyenne. Ici, point de plage privée. Mais point de camping non plus. Guy Petit entretint les mondanités de l’hôtel du Palais qui contribuèrent à y accueillir une certaine clientèle en vue. Il courtisa en même temps une riche clientèle espagnole, qui venait respirer à Biarritz un petit air de liberté que ne leur accordait guère la dictatoriale Espagne franquiste. Biarritz maintenait son standing.

Photo Auteur inconnu
Elle vivait quatre mois sur douze d’une société d’économie mixte : s’y côtoyaient deux populations distinctes, dont la Grande Plage est le symbolique reflet : les familles sur le sable, la jet-set au Palais. C’est un aspect important : le Palais est le seul exemple, à notre connaissance, d’un palace dont la terrasse donne sur une plage aussi populaire, familiale et grouillante d’animation que la Grande Plage. Et tout le monde se croisait sur le promenoir sans gêne mutuelle. À Biarritz, on pouvait se promener à loisir sans être dérangé par une nuée de paparazzi non plus que par les touristes ou la population locale. L’autochtone savait regarder évoluer avec placidité et une saine philosophie cette double société qui lui permettait de vivre tranquillement le reste de l’année : le Biarrot ne s’émeut pas de si peu.
Les autres huit mois, Biarritz devenait une belle endormie ; on a même eu un temps l’impression qu’elle était une vieille belle sur le retour, qualification qui n’engage que l’auteur de ces lignes. Elle redevenait une petite cité provinciale de vingt-cinq mille âmes sans beaucoup d’animation. Nous vécûmes ces années à la fois viscéralement attachés à notre ville, ses bâtiments majestueux menacés de décrépitude, un casino municipal inutilisé vieillissant, et sa sublime côte, l’océan, ses vagues, son calme ou ses colères, et les caprices d’un climat qui nous permet parfois de voir défiler quatre saisons en une journée. L’envie d’y demeurer donc, mais l’idée souvent que l’avenir serait ailleurs. Biarritz perdait sa jeunesse, Biarritz s’endormait, Biarritz vivait en autarcie, Biarritz n’était plus à la mode.
Et vint 1991.
Demain : D’une politique de tourisme et de l’hôtel du Palais – 2
Vivement demain ! 😊
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Extrêmement remarquable. Quelle plume! Merci,Monsieur Saury, je vous découvre e france:ent, ne vois pas, à Ce jour et à ma connaissance, qui à Biarritz écrirait ausi bien que vous! Vous poirriez, vous devriez en écrire l’histoire, si ce n’et déjà fait, si ce n’est ce qu’ici, au travers d’un prisme très particulier, vous commence à faire;
Comme « Christiane », je ne puis que dire « Vivement deman! ». C’est d’ailleurs aujourd’hui……
Je suis candidat à la mairie de Biarritz et c’est une position que j’assume pleinement, quand bien même elle est délicate « ici et maintenant ». Débat ibublic et débats prvés ne font pas toujours bon ménage…
Sur « le Palais », donc, il me faudra ronger mon frein et attendre vos dires sur le montage actuel s’ils viennent.
D’ores et déjà, deux points de désaccord:
– une erreur technique : Non, la Socomix n’est aucunement une société « privée »! Cest une société PUBLIQUE, comme toutes les sociétés d’économie mixte locales (SEML) à majorité de capital public, auxquelles la Cour des comptes vient de consacrer un rapport éreintant;
– un point de fond: Non, je ne pense pas du tout que ç’ait été une décision « visionnaire » de Guy Petit que de faire racheter le Palais par la Ville.
On en reparlera…si vous le voulez bien…
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Merci pour vos compliments, ils me sont très agréables.
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Cher Monsieur, si vous entendez privée ou publique comme « appartenant » à un privé ou à une structure publique, on peut vous suivre.
Vous remarquerez que j’ai pris la précaution d’écrire « de Droit privé » et cela n’est pas une erreur technique, c’est le Droit.
Si Guy Petit ne l’avait fait, le Palais serait aujourd’hui une résidence privée. Vous avez le droit de le souhaiter, pourquoi pas ?
Un candidat à des élections municipales avait bien proposé qu’il fût transformé en colonie de vacances
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Merci monsieur Saury pour ce merveilleux travail. Je suis pleinement d’accord et tant mieux que la mairie ait pris la sage décision que tous ceux qui aiment Biarritz ont soutenu. Il n’y a guère que certains arrivistes au sens business du terme qui voulaient dépouiller la ville de son écrin . Quand au monsieur qui est candidat à la mairie et il en a parfaitement le droit, il faut qu’il se rende à l’évidence qu’on ne fait pas un projet d’avenir avec des revendications du passé. Le viaduc de la Negresse fait maintenant pleinement partie de l’histoire de ce quartier ,tout comme sa dénomination. Les vieux biarrots se souviennent des douloureuses mobilisations du siècle dernier contre la construction de ce viaduc. Il est 50 ans après , une réalité de la ville. C’est des combats d’arrière garde de has been qui n’ont rien à dire. Pfff.Merci encore pour ce merveilleux travail historique et poétique.
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